Nicole CHARDON ISCH

Certifiée en Lettres classiques et Dr en Sciences du langage, Nicole CHARDON-ISCH, née le 20 septembre 1958 à Fort-de-France enseigne la littérature et le latin à l’université. Elle a soutenu avec succès une thèse de doctorat en sociolinguistique à l’université Antilles -Guyane en 2002.
Tout au long de sa carrière elle a à coeur de donner le goût de la langue française et ses apports classiques à ses élèves de lycée ou de collège, leur proposant des pratiques innovantes et des ateliers de productions écrites, inspirés de la psychologie cognitive.
Dans son pays de coeur, la Nouvelle Calédonie, les découvertes culturelles et humaines l’amènent à écrire régulièrement nouvelles, contes, poésie inspirés par le terroir ; dans le même temps, elle prolonge sa passion pour l’exploration des textes locaux, initiée à la Martinique, en explorant les littératures d’auteurs calédoniens confirmés ou émergents. Ainsi elle est l’auteur de nombreuses études littéraires, d’articles de colloques, de pistes pédagogiques et publie aussi des textes littéraires.
Son implication depuis 7 ans dans l’association Ecrire en Océanie la conduit naturellement à diriger une collection, Un auteur une nouvelle, puis à assumer la fonction de présidente depuis 2017. Elle entend contribuer à la production et à l’expansion de la littérature calédonienne, qui mérite d’être plus connue extra muros.

Bibliographie

Publications :
  • 2004 : article « Accueil et scolarisation d’enfants étrangers à la Martinique : étude sociolinguistique »
  • Roman Epopée de la source Didier, Bénévent, 2007
  •  Colloques au sein du Laboratoire de Lettres  et du Laboratoire « CORAIL » à l’UNC.
  • 2008: article pour la revue et le colloque Etudes Créoles : « Le spectacle des Kréyolades ». Analyse littéraire et sociolinguistique d’un corpus de formes brèves écrit en langue créole pendant 5 ans par Judes Duranty, qui passe en revue des faits, des comportements martiniquais.
  • 2008 : article de présentation et analyse de l’oeuvre littéraire de Nicole Cage-Florentiny
  • Ouvrage sociologique : Présence créole en Nouvelle Calédonie, avec Gentiane Bisio-Firmin-Guion, 2015
  • recueil de productions préfacées, in Atelier d’écriture à Païta , (Association Ecrire en Océanie) avril à octobre 2016
  • Recueil de nouvelles : Histoires de la Tamoa, avril 2016, L’Harmattan
  • Recueil de contes : Le Potager de Benjamin, suivi du Réveil des animaux de pierre, Ecrire en Océanie, juillet 2016
  • Le Pneu du col de la Pirogue in Recueil collectif de nouvelles fantastiques Au pays des bulimes , août 2016
  • Nouvelles, La Sève bleue, Ecrire en Océanie, 2017
  • Conte, Pourquoi le cochon est marron, Ecrire en Océanie 2017
  • Roman jeunesse, Le Rêve d’Ana, L’Harmattan, mai 2018
  • Supports pédagogiques : 20 fiches sur les Littératures de Nouvelle Calédonie, CDP, volume 1, juillet 2018

Interview

Nicole Chardon-Isch était interviewée le 27 juin 2018 par Véronique Armand, enseignante, qui a fait intervenir de manière pertinente et interactive de jeunes lecteurs pour une causerie sur son roman jeunesse Le Rêve d’Ana, paru en mai chez L’Harmattan. VA : Pourquoi avoir choisi le conte ? NCI : J’ai exploité une fois encore une forme d’écriture qui dit mon attachement au genre qu’est le conte : une forme brève, simple et dense, un concentré de narration avec une structure ascendante. Le besoin inné de justice s’y  trouve satisfait, le conte finit bien pour Ana, qui en plus, par le biais de la transmission du langage, va faire d’autres heureux. Il a ses vertus thérapeutiques, éducatives. Rempli d’images iconographiques et évocatrices, il convoque tous les sens, l’audition, l’odorat, le toucher, la vue, le goût. VA : Malgré sa forme narrative on voit à la fois beaucoup de poésie dans les évocations et les images, et un vocabulaire soutenu. Les enfants n’ont pas compris tous les mots même s’ils ont aimé l’histoire. NCI : Le livre a plusieurs niveaux de lecture ; au départ il n’était pas destiné aux enfants à partir de 8 ans, mais convenait plutôt pour des enfants plus grands, au collège. Ils peuvent y trouver des éléments d’argumentation sur les représentations et travailler le schéma narratif.  Le merveilleux, l’exploitation d’un aspect de la mythologie kanak, avec les mwaken, le goût pour la magie poétique des mots, une certaine exigence littéraire m’ont guidée. Il me semble important de mener les lecteurs vers un dépassement de soi : après la lecture d’un schéma narratif simple, ils reprennent le livre six mois, un an, trois ans plus tard et la maturité aidant, ce sont de nouvelles découvertes, une relecture plus curieuse, plus approfondie qui les attend ; comme dans la contemplation d’un tableau, l’on découvre au fil du temps un détail, des aspects qui nous ont échappé ; de plus c’est un moyen de se constituer une bibliothèque et de développer le goût du livre. VA : Comment est venue l’idée d’écrire sur une cane ? C’était difficile ? NCI : Le choix de la canette qui veut devenir une petite fille permet de faire la passerelle entre deux mondes et introduit le merveilleux ; la métamorphose est un topos du conte, ainsi que la fée, ici  la reine des Mwaken. Quant à la difficulté, je ne le dirai jamais assez, écrire peut se faire de manière spontanée avec l’habitude et l’inspiration d’un moment ; mais le plus souvent, écrire, écrire ce conte est une élaboration poétique, la recherche du mot le plus juste, l’oscillation entre le mot courant et le degré plus évocateur de ce même mot, pour donner plus d’éclat aux images et évocations, pour créer un rythme enchanteur à l’oreille et à l’esprit. C’est une élaboration poétique, un travail de recherche à partir de l’histoire d’un mal-être, de la quête du bonheur. En se dépassant, en se déplaçant on fournit des efforts pour améliorer son quotidien, et du coup d’autres personnes peuvent bénéficier de ce nouvel état d’épanouissement auquel on accède. Le bonheur est partage, j’y crois profondément. Mais pour l’écrire il faut travailler ses mots. VA : Les enfants vont lire un extrait et dire l’image qu’ils ont choisie. NCI : Quel plus bel hommage pour Le Rêve d’Ana que la réception fraîche et spontanée de ces enfants ! Je vous remercie, Julie, Jason, Orphée, les enfants de Marie-Noëlle, Nathalie, Ondine, Claire. Je suis heureuse de voir l’utilité sociale de ce conte qui émerveille, séduit, apaise l’enfant et ravit l’adulte. VA : Les enfants sont très touchés par un personnage, la reine Mwakeny. NCI : Oui, c’est une grande figure, qui permet la métamorphose d’Ana et l’accession à son rêve. D’abord sévère, elle manifeste son mécontentement d’être dérangée et sa désapprobation envers les humains ; mais elle reste sensible à la détresse de la petite cane et accède à sa première demande, en posant un interdit. La seconde demande d’Ana sera suivie d’une exigence, d’un cadeau comme le dit Florence Rouillon, enseignante de Lettres Modernes : le devoir de transmission de la langue des signes. La remise du bambou gravé devient le symbole d’une nécessaire transmission à ceux qui vivent dans le monde du silence. Plus heureuse que la petite sirène, elle s’épanouit pleinement dans le partage. VA : As-tu travaillé de concert avec l’illustrateur ? NCI : Bernard Billot, dit Papou, a très vite compris ce que je voulais et j’aime son graphisme ainsi que la luminosité de ses couleurs ; on est vite tombés d’accord. Sa seule remarque est que dans la réalité les canetons ne volent pas, il n’a donc pas représenté Ana volant ! VA : As-tu d’autres projets littéraires ? NCI : Oui, en juillet, donc très bientôt paraît un recueil auquel je travaille depuis plusieurs années ; il s’agit de lectures, d’analyses et  de séquences pédagogiques pour le collège, le lycée et l’université. Une manière de faciliter la lecture d’œuvres calédoniennes et de les diffuser plus largement, dans les établissements scolaires, véritable vivier de lecteurs. Des auteurs connus et émergents, des genres divers comme le slam, le conte, le roman la nouvelle, la poésie y sont considérés. Il contient aussi quelques conférences universitaires. Un second volume est déposé, auquel cette fois a collaboré un collectif de collègues de français. Pour le reste, écrire est un besoin intarissable.