Association des écrivains de Nouvelle-Caledonie

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Un article biographique : “JEAN VANMAI, DU COEUR A L’OUVRAGE”

Jean Vanmai, du cœur à l’ouvrage

L’auteur calédonien de renom et fils de travailleurs tonkinois continue son combat. Celui de la reconnaissance de l’histoire des engagés vietnamiens sur le territoire.

Il nous a reçu chez lui à Nouméa, dans son appartement chaleureux à la décoration éclectique. Jean Vanmai, 77 ans, est accoutumé aux entretiens avec les journalistes. Il faut dire que son parcours est atypique. De l’arrivée de ses parents en 1937 sur le Caillou pour travailler sur la mine Chagrin, à sa reconnaissance en tant qu’écrivain, il y a un monde. Cet autodidacte semble avoir vécu mille vies. Débarqué du Vietnam, son père est engagé pour cinq ans comme main d’oeuvre dans la centrale électrique. C’est sur la mine Chagrin près de Koumac qu’il naît et grandit. De cette enfance précaire, il ne retient que les bons moments. « À l’époque, je vivais pieds nus. Avec les copains on jouait autour de l’usine de chrome, dans la nature. On n’avait rien comme jouet. Mon camion à moi, c’était une boîte de sardine que je tirais avec un bout de ficèle », raconte-t-il le sourire aux lèvres. Il est l’aîné de huit frères et sœurs auprès desquels il grandit, isolé dans un village de Tonkinois. « On ne pouvait pas fréquenter les écoles françaises. Sur la mine, mes compatriotes nommaient un « lettré » pour être l’instituteur vietnamien. Il faisait réciter des leçons par cœur aux enfants pour les occuper », avoue-t-il. Chance pour Jean, le sérieux de son père au sein de la mine lui permet d’intégrer une école française. Il a alors 10 ans. Puis vient le collège. Il fait ses classes à Nouméa, aux frais de ses parents. En parallèle, Jean suit des cours d’électronique par correspondance, il répare des électrophones et des récepteurs radio.

En 1960, sa vie bascule. Alors qu’il a 20 ans, sa famille et ses amis embarquent à bord du Eastern Queen pour Hai Phong, la ville de ses ancêtres. Il doit être du voyage mais se ravise au dernier moment. « Toutes mes affaires étaient à bord du navire mais j’ai décidé de ne pas partir. J’étais une tête brûlée ! J’ai donné une lettre d’adieu à un chauffeur de taxi à l’Anse Vata, pour qu’il la donne à mes parents ».
Ce qui lui reste est dérisoire. Une paire de claquettes, un jean, une chemise et 3000 francs en poche, il prend la décision de sa vie. Un acte ni politique ni révolutionnaire.


Il a trouvé l’amour

« J’avais rencontré une femme. C’était une voisine à Koumac, elle était Futunienne et si belle », révèle-t-il heureux. Cette femme, c’est Eléna, avec qui il vit depuis plus de soixante ans et avec qui il a eu trois enfants. Une pulsion d’amour qu’il ne regrette pas, mais qui l’éloigne de sa famille pendant 15 ans. « À chaque fête du Têt, je désespérais de revoir les miens. Les lettres que nous recevions du Vietnam étaient contrôlées par l’État. Je ne savais pas ce que vivaient mes parents et mes frères et sœurs à l’époque. La censure était de mise », raconte-t-il le visage fermé. En attendant, il économise et leur envoie de l’argent. En 1975, à la fin de la guerre du Vietnam, il réussit à atteindre le pays. « J’ai revu ma mère, elle était resplendissante. Elle m’a regardé et m’a dit : « mon fils aîné, quel bonheur que tu sois resté en Nouvelle-Calédonie ». À ce moment-là, toutes mes craintes se sont enfuies. « J’avais fait le bon choix », lâche-t-il. Sur place, il découvre les conditions de vie précaire de sa famille. « Lorsque j’ai vu la cuisine de ma sœur, je n’ai pas pu retenir mes larmes », avoue-t-il. À son retour sur le territoire, Jean continue son ascension professionnelle.

Le silence des parents

Il s’associe au patron d’une société d’électroménager et d’électronique, mais son envie de raconter son histoire et celle de sa communauté est forte. « Je me suis dit qu’il fallait que quelqu’un raconte cette histoire, on ne pouvait pas accepter qu’elle tombe dans l’oubli », assure-t-il en s’adossant sur son fauteuil en rotin.

Cette histoire familiale emprunte de misère ne lui a jamais été racontée par ses parents. « Jamais ils n’en ont dit mot », révèle-t-il. Par pudeur mais aussi et surtout pour ne pas attiser les rancœurs. « La détermination des populations Tonkinoises consistait à éduquer les enfants à réussir financièrement pour s’en sortir ». Le silence de ses parents sera pour lui un moteur. Après quatre années d’hésitation, il publie en 1980 le récit historique Chân Dang, qui retrace l’histoire et les conditions de vie des travailleurs vietnamiens. Cet ouvrage marque le début d’une seconde carrière, celle d’écrivain, pour laquelle il signe plus de 10 romans. Un moyen pour le septuagénaire de « ne pas effacer le passé », conclut-il.

Alix Madec

N° 2 de la nouvelle revue (bimestriel) “Carnets du Pacifique” de février 2019.

Du cœur à l’ouvrage

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